TOMOYO AFTER – Se voir pleurer dans le reflet de son écran
J’aime beaucoup l’existence de Tomoyo After. En dépit d’être une suite à la route de Tomoyo dans CLANNAD, ce n’est pas pour autant un fandisc. C’est réellement un VN à part entière qui s’opère à raconter une grande histoire. C’est toujours un format qui ravit. C’est plaisant d’avoir une suite qui ne soit pas l’affaire d’une ou deux heures autour d’un personnage, même si on n’est pas spécialement fan de ce dernier. C’est justement mon cas pour Tomoyo After.
Je sais que beaucoup de personnes tiennent en grande affection Tomoyo dans CLANNAD, mais au risque de peut-être en décevoir certains, c’est loin d’être mon cas. Je ne la déteste pas pour autant, mais c’est clair que j’aurais manifesté plus d’engouement à la fin de ma lecture sur CLANNAD s’il y avait eu un VN narrant la suite d’une autre route.
Après, cela ne m’a nullement freiné pour lire Tomoyo After. Au contraire, mon appréciation de Tomoyo étant modéré, j’étais davantage exigeant sur sa qualité. Dans ce cas de figure, arriver à dépasser cette exigence est presque toujours le signe d’un objet qui a su me surprendre et me plaire. Et c’est totalement ce qu’a réussi à faire Tomoyo After.
A l’instar de mon article où je parle d’une scène que j’adore dans CLANNAD, j’ai envie de faire de même avec Tomoyo After. Factuellement, cet article est encore l’affaire d’un énorme SPOIL, et je conseille vivement de ne pas lire la suite si vous ne connaissez pas le VN et que vous comptez le découvrir.
La thématique de la famille étant aussi au premier plan de Tomoyo After, je pense qu’on peut facilement se demander au début s’il ne s’agit pas que d’une simple alternative à After Story avec d’autres personnages. Ce que n’est pas du tout Tomoyo After. Au contraire, celui-ci aborde la famille et les autres thématiques de CLANNAD d’une toute autre manière.
Si CLANNAD tire toujours ses histoires par des conclusions éminemment joyeuses, Tomoyo After tend bien plus à les diriger vers des fins tragiques. Dans After Story, les miracles existent. Contre toute attente, Ushio et Nagisa peuvent survivre tous deux et être heureux avec Tomoya. Dans Tomoyo After, il n’y a pas de miracle, seulement de vains espoirs. Tomoya décède et Tomoyo est vouée à passer le reste de sa vie seule. Néanmoins, je ne dirais pas que Tomoyo After est pour autant une antithèse de CLANNAD. S’il s’agit techniquement d’un VN qui n’est pas la suite de CLANNAD, je suis d’avis qu’il en est pour autant sa suite officieuse. J’expliquais dans CLANNAD – Cette scène que j’adore que sa fin opère une transition vers un lieu où la fiction n’a plus lieu d’être : notre réalité. Et je suis convaincu que Tomoyo After cherche à parler de cette dernière. Chaque arc narratif de Tomoyo After est plus représentatif de ce que nous vivons nous, lecteurs, dans la vraie vie. Nos différents moments de vie sont loin d’être tous merveilleux. Mais malgré tout, et c’est ce que porte Tomoyo After tous le long de son histoire, la vie continue, et c’est une Wonderful Life. Même s’il y a des moments durs, il faut vivre et penser pour ces moments et ces choses qui nous rend heureux.
Ce qui m’amène à parler de la scène qui m’a complètement retournée et qui est, sans trop grande surprise, à la fin de Tomoyo After. Encore une fois ici, les caractéristiques du AVG signent leurs absences. Mais cette fois-ci, pas d’image en prise de vues réelles, simplement du texte sur fond blanc qui apparaît à la manière d’un texte tapé sur ordinateur. L’immersion est totale. Les lignes que nous voyons sont écrites par Tomoyo. Elle écrit sur un forum comment sa vie est merveilleuse, malgré tous les moments cruels dont sont dotés sa vie. Comme Tomoya l’a fait avec elle, elle cherche à donner de la force aux gens pour continuer à se battre et à considérer leur vies comme une Wonderful Life. Elle s’adresse directement au lecteur qui lit ses mots derrière son écran. Ce qu’elle dit est d’une sincérité et d’une justesse magnifique. A ma première lecture, plus le texte se déroulait, et au plus je pleurais. Non sans me considérer dépressif ou perdu, l’optimisme qu’elle dépeint de la vie en te parlant directement à toi est d’une force incommensurable. Le fait qu’elle veut t’aider TOI tout particulièrement est si fort. Tomoyo n’est pas quelqu’un qui nous est inconnu. Nous la connaissons depuis CLANNAD et avons vu tout ce qu’elle a vécue, c’est quelqu’un d’attachant, voire d’important pour nous. Nous ne sommes plus face à un personnage qui vit des choses et par laquelle on peut se reconnaître par transposition, on est face à quelqu’un qu’on aime et qui veut nous aider. Cette scène se termine sur un fondu au noir qui m’a particulièrement marqué. De par tout ce qu’a écrit Tomoyo pour le lecteur derrière son écran, on est d’autant plus amené à porter une attention au reflet de son écran lors de ce fondu. Me voir en larmes à ce moment, juste face à moi-même, m’a vraiment bouleversé.
Je trouve ça très bien d’avoir fait une mise en scène complètement dépouillée. Cela fait ressortir ce dialogue direct avec le lecteur. Avoir des images, en prises de vues réelles ou non, aurait complexifié la nature de l’échange.
J’aime beaucoup comment ce rapport meta à l’ordinateur s’accorde naturellement à notre réalité. J’aime le fait d’avoir trouvé des avis sur Tomoyo After identique au mien sur internet, et, surtout, d’en avoir trouvé sur des forums. C’est comme si Tomoyo avait vraiment posté sur un forum et que d’autres avaient réellement répondu à ses posts. A l’instar de Tomoyo, certains partagent des moments de leurs vies et, comme Tomoyo, cherchent à donner force et optimisme sur la vie à ceux qui les lisent.
Un visual novel total.