ALLEZ JOUER DEHORS ! VOLUME 3 – Témoin matériel

Si je touche à internet depuis mes 5 ans, ma première grande expérience communautaire se situe plus autour de mes 16 ans avec le site Legendra. Je consultais déjà le site bien avant, j’ai mis longtemps avant de me dire ‘‘Et si je me faisais un compte, et que j’échangeais avec eux ?‘‘.
J’étais déjà animé à cette période par l’idée de faire un blog, et le site propose d’en faire en son sein, c’était donc tout trouvé pour moi de m’introduire par ce biais. Legendra, ce sont les prémisses de mon site actuel.
La communauté de Legendra est loin d’être la plus accessible. Ce n’est pas qu’elle n’est pas accueillante, mais je dirais qu’elle est composée de personnalités avec qui c’est très facile de ne pas adhérer. C’est sûrement paradoxal que ma première insertion au sein d’une communauté se soit faite dans une communauté comme celle-ci. A bien des égards, je ne pense pas qu’elle soit faite pour moi. Mais d’un autre côté, j’ai une réelle affection pour elle. Il y a des choses qui me déplaisent profondément dans certaines conversations tout comme il y en a que j’apprécie beaucoup. C’est bien pour cela qu’aujourd’hui, j’échange toujours avec eux, et que c’est même toujours eux avec qui j’échange le plus sur internet. Il y a encore des choses que je veux vivre là-bas, mais je sais qu’un jour je m’en éloignerai. Je ne sais pas quand. Dans deux semaines peut-être, ou bien dans trois ou six ans… Va savoir. Cela arrivera comme ça, d’un jour au lendemain, et je serais sûrement content d’être partie vers d’autres horizons. Mais non sans oublier tout ce que j’ai aimé à leurs côtés, et sans oublier de passer quand même le coucou de temps en temps.

Si je parle de tout ça, c’est parce que j’ai vécu un événement qui n’est pas des moindres chez Legendra récemment. L’un de ses membres, Benone, m’a proposé que je reçoive un livre qu’il a conçu avec d’autres personnes. C’est peut-être anodin dit comme cela, mais c’est quelque chose qui a suscité chez moi beaucoup d’émotions. C’est la première fois que quelqu’un chez Legendra m’envoie en toute amitié quelque chose. C’est d’une valeur inestimable. Ce livre, Allez jouez dehors ! Volume 3 n’est pas juste un livre d’un collectif où il y a Benone, c’est une matérialisation physique de Legendra. Quoi qu’il advienne désormais de Legendra dans le futur, je sais que j’ai maintenant quelque chose qui témoignera éternellement de Legendra et de ce que j’ai vécu à ses côtés.
Particulièrement honoré d’avoir eu tel livre, et gratuitement, il était impensable pour moi de ne pas écrire à son sujet.

Rickie est un autre pseudo de Benone.
Il a fallu m’envoyer un deuxième exemplaire du livre. Le premier n’est jamais arrivé à destination…

Allez jouez dehors !, c’est une série de fanzines québécoises composées d’essais autour du jeu vidéo. Jusqu’à présent, trois volumes ont été faits, et c’est donc le dernier que j’ai reçu. Sur chacun de ces volumes, différentes personnes interviennent à différents degrés et sur différents angles pour parler du jeu vidéo. Cela peut être un souvenir ou encore une critique. Un texte peut ne durer qu’une page comme il peut en faire une dizaine. C’est une démarche très libre et très décomplexée.

Ce sont des textes très personnels à chaque fois, toujours avec des anecdotes précises. Certains témoignent d’un regard averti sur le jeu vidéo, d’autres, au contraire, montrent une perception plus légère de celui-ci. Je trouve que cela dessine très naturellement un paysage global du jeu vidéo. Et beaucoup plus facilement que de livres produits sous la tutelle d’éditeurs. C’est un livre libre.
Tous les textes de ce volume 3 sont des témoignages qui sont à la fois humbles et sincères. Personne n’aborde un sujet comme s’il le maîtrisait sur le bout des doigts. Chacun parle de ce qu’il sait et de ce qu’il ne sait pas.
Comme si cela allait de pair, tous ces textes se révèlent très accessibles et didactiques (sauf peut-être celui sur Snake, qui est plus du côté du poème ?). Impossible d’être perdu ou d’avoir un terme qui nous échappe. Ce sont des textes bienveillants. Une bienveillance qui est même parfois le sujet central d’un texte.

Je constate quand même une dramaturgie temporelle dans ce recueil. Les premiers textes traitent davantage de souvenirs lointains alors que les suivants sont plus récents. Malgré les libertés de chacun, cela donne une direction à la lecture, un peu comme un voyage où l’on rencontre différentes personnes.
Je pense que le fait que ce soit un fanzine québécois ajoute aussi à cette impression de voyage. Le Québec et le jeu vidéo ont une histoire qui est plus affilié aux territoires américains. Il y a notamment des jeux qui ne sont pas sortis en Europe mais que les québécois ont pu toucher, et inversement. Je ne maîtrise aussi pas le québécois et ses quelques différences avec le français. Cela rajoute de mon côté un exotisme qui n’est pas volontaire à la lecture.
Ce volume a aussi la bonne idée de terminer sur le seul texte écrit à plusieurs. C’est comme si à la fin de ce voyage, les expériences individuelles convergeaient. Je n’ai pas lu beaucoup de textes où des gens parlent en même temps d’une expérience multijoueur qu’ils ont vécu ensemble. J’ai vraiment aimé lire cette expérience partagée autour de Stardew Valley, même si ce qui est conté n’a rien d’extraordinaire.

Aucun des textes de Allez jouez dehors ! Volume 3 ne me paraît d’ailleurs extraordinaire dans les jeux qu’elle aborde, mais c’est loin d’être problématique. Je trouve que tout l’intérêt de ce fanzine est dans le fait d’avoir des témoignages intimes. C’est une parole individuelle qui circule d’un individu à un autre. Je me sens proche de ces gens. Sur ce point, c’est beaucoup d’agréables surprises.
Au regard de la démarche créative du recueil, j’ai été très étonné d’avoir un texte sur Star Citizen. C’est un récit avec pas mal d’action et qui est très rafraîchissant. Il a aussi le bon goût de ne dire qu’à la fin de quel jeu il s’agit. Et ça, il vaut mieux. C’est Star Citizen après tout. C’est compliqué à vendre, et il s’en sort bien !
Un autre texte qui a bien matché avec moi, c’est celui qui parle du site Puissance Zelda. J’ai moi-même pas mal trainé là-bas quand j’étais plus jeune. Cela m’a rappelé pas mal de souvenirs. J’en ai profité pour regarder après comment se portait le site… Et bigre, ça a bien changé. C’était tout jaune de partout quand j’y allais.
Je m’arrêterais là pour les exemples. Je ne veux pas trop en dire sur ces textes.

Les volumes de Allez jouez dehors ! sont distribués d’une manière qui m’incite à garder au chaud son contenu. Ce sont des volumes qui ne sont que partagés physiquement et dans un cercle réduit. Fait paradoxal au regard de son contenu accessible.
Je pense que c’est un facteur qui n’est pas des moindres dans ma réception du recueil. Cela renforce beaucoup ce sentiment de rentrer dans l’intimité des auteurs. Un texte de Benone fait écho à cela lorsqu’il parle de son attachement pour les jeux physiques. Pour lui, les jeux physiques, c’est synonyme de rencontre. C’est une expérience qui est sociale et matérielle. Le parallèle à faire avec la distribution du fanzine m’apparaît évident.

Autre caractéristique importante d’Allez jouez dehors ! : chaque texte a des illustrations.
A l’instar des textes, plusieurs personnes ont mis la main à la pâte pour les faire. Même si c’est quand même les dessins de Benone qui prédominent. J’avoue que j’aurais préféré avoir un meilleur équilibre en termes de participation. Mais je pense que c’est le fruit des envies de chacun.
Dans tous les cas, ce n’est pas du dessin professionnel. C’est vraiment du dessin indépendant / amateur qui s’assume complètement. L’expérience du dessin de chacun est sûrement très variable, mais chacun en tire une force. Les dessins de Benone m’apparaissent très brouillons, voire grossiers, mais je leur trouve un vrai charme. Il a développé son style, je reconnais quand les dessins sont de lui. Ce sont des dessins qui ont une âme.
J’ai toujours été fan de ce qui est fait de bric et de broc, et avec les moyens du bord. De ce qui touche de près ou de loin au brouillon. J’aime ces formes qui conservent ce genre d’attrait.
Tout cela va de pair avec l’esprit des textes. Décontractés et sincères.

Je pense que c’est mon illustration préférée d’Allez jouez dehors ! Volume 3 ! Je le trouve mignon et rigolo à la fois ce mage noir.

Ce n’est nullement sa prétention, mais il ne peut pas en être autrement, Allez jouez dehors ! Volume 3 est un livre qui ne peut m’être qu’inoubliable. Je l’ai déjà dit ici, et je l’ai déjà sûrement trop dit à Benone, mais je suis si honoré d’avoir un tel objet. Je ne peux que chérir énormément celui-ci. Je considère vraiment ce cadeau comme un marqueur important de tout ce que j’ai entrepris jusqu’alors sur internet. La démarche et le contenu de ce recueil résonnent beaucoup en moi. C’est une belle ode à la liberté. C’est comme si ce livre était aussi une preuve matérielle que ce que je fais a du sens. J’ai l’impression que ce recueil est le signe d’une étape franchie dans ma vie. C’est motivant et émouvant. Plus que jamais je regarde mon avenir avec détermination et envie, convaincu du chemin que j’ai choisi d’entreprendre. J’ai bien fait, d’être partie jouer dehors.
Alors merci,
Benone,
dentdemais
Planette.ch@t
Siracha
Erigéronne
King Zora Digest
MaB*
et la Starcrew Valley !

Et vivement un volume 4 !

3 commentaires

  1. Cher Elsental,

    C’est si rare d’avoir un aperçu de ce qu’un zine provoque. On créé ces petits fragments issus de nos vies intimes, ils sont distribués de façon mystérieuse et aboutissent souvent en des endroits inattendus, passant de main en main amie dans leur périple. Il arrive, par chance, que l’on rencontre l’auteur ou l’autrice d’un zine qu’on a aimé, en quelque salon de zines, café ou cuisine d’ami.es. Alors, un peu gêné, on raconte à quel point son livre nous a ému. Peut-être, avec un peu de courage, ou si on a la chance d’avoir une bonne mémoire, on parle d’un passage qui nous a touché. Pour moi en tout cas, les rares fois ou j’ai eu cette chance, ce remerciement, cet hommage, a été assez bref, mais toujours avec le désir de réussir à exprimer à quel point tel zine a été important.

    Tout ça pour dire que je trouve que tu nommes vraiment bien les choses ; je trouve que l’echo de ta lecture rend avec justesse ce que tu as vécu (et ça me permet à mon tour de mettre des mots sur mon expérience). Enfin, le fait que cet écho puisse se rendre aux auteurs et autrices est vraiment précieux!! Alors oui, vivement le volume 4 (peut-être même pourras-tu t’y joindre 😉 ?)

    Merci pour ce bel hommage, bonne suite!

    ZARZAR,
    Bic, Québec

    • Merci beaucoup pour ce beau commentaire. Je suis ému d’avoir pu réussir à donner des mots à ta propre expérience.
      Pour un volume 4, je suis évidemment ouvert à toutes les propositions !

  2. Merci de cette critique! C’est élaboré et très apprécié d’avoir un retour si croustillant. Je ne savais pas à quel point ça pouvait être aussi bien reçu. Je suis content d’avoir pensé te le proposer! Je t’écris bien vite pour une collaboration du prochain volume.

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